Jean-Philippe Brunaud : Questions de Temps…
Du 3 Avril au 3 Mai 2025, l’exposition « Entre-temps » propose de découvrir les pièces les plus récentes de Jean-Philippe Brunaud, questionnant la présence humaine dans le paysage et son devenir, et au-delà interrogeant la fugacité de la vie.
Dans une temporalité qui se situe entre le présent et un futur plus ou moins lointain, les œuvres interrogent la place de l’Homme au cœur de son environnement originel, le paysage. La présence humaine est volontairement discrète, solitaire, comme si elle pouvait disparaitre. Ces images incitent à une double lecture : au départ une image plutôt banale, qui ensuite peut se transformer en version anticipée d’un monde en devenir, où la normalité de la présence humaine pourrait devenir une exception. Questionnement en lien avec les inquiétudes fondées de notre avenir proche et plus généralement sur la fragilité de la vie.
Rencontre avec l’artiste dans son atelier…
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Delamour Gallery : L’exposition présente 2 séries qui se suivent et se chevauchent : Entre-Temps et Witness, qu’est-ce qui les lient ?
Jean-Philippe Brunaud : La thématique est un peu la même et elles se suivent dans le temps: J’ai commencé avec Witness qui présente une nature assez reculée, avec un personnage solitaire au milieu de cet environnement, qui est là comme un témoin, qui regarde ce qui s’y passe. L’important est qu’il est là pour prendre les informations mais qu’il ne les redistribue pas : il n’est pas acteur. Puis j’ai continué à avancer et le personnage dans mes peintures a fini par disparaître pour que ce soit le spectateur lui-même qui devienne le témoin. Mais pour les deux séries, ce que je raconte est un peu similaire. C’est une histoire qui va à la fois questionner l’état de notre planète, et la direction que nous prenons dans le futur… J’aime brouiller les pistes pour que le spectateur ne sache pas vraiment où l’on se situe au niveau temporel. Est-ce que c’est une image tirée de ce que j’ai vu aujourd'hui, ou est-ce une anticipation de ce qui pourrait se passer plus tard ?
“Indifférente moiteur”, huile sur toile, 65 × 92 cm
Les paysages de vos peintures sont-ils inspirés d’endroits réels, réalisés in-situ, ou bien sont-ils totalement imaginaires ?
Je ne peins pas sur site. Ces paysages sont inspirés soit d'endroits que je vois, soit d’images que je trouve ailleurs, sur Internet principalement. Ensuite, dans tous les cas, que ce soit des images que je prends moi-même ou que je récupère, je les transforme. Elles servent de base ; je les sélectionne parce qu'elles me racontent quelque chose. Après avoir commencé à les poser sur la toile, je ne les regarde plus, pour m’en défaire et travailler librement.
Le paysage, la nature, sont très présents dans vos toiles, l’humain beaucoup moins, pourquoi ?
Pour moi, une montagne, un océan, une forêt, la nature en somme, c’est ce qui restera, un temps presque immuable. L’humain, ne fait que passer, aujourd’hui peut-être encore plus qu’hier. C’est pour ça que l’humanité, qui peut être figurée par un personnage, une route, un lampadaire, une maison, etc…a toujours une place relativement discrète dans l’image que je propose. Dans mon travail, je questionne le temps, c’est le propre de la vie, d’un début et d’une fin. Par nécessité, je le calme, le rend un peu visqueux, suspendu, pour mieux le regarder.
“Seul au monde””, huile sur toile, 24 × 33 cm
Par exemple, sur cette peinture [Seul au monde, ndlr], c’est un paysage de nuit qui présente une nature immense et primaire. L’humanité en est totalement exclue, si ce n’est ce petit point de lumière dans la montagne. Je sème le doute : Peut-on dater cette image ? Cette lumière est-elle un des derniers signe de notre passage sur terre ou est-ce juste un choix de cadrage ?
Ici [La Maison Bleue, ndlr], pour moi c’est comme si on était en voiture, qu’on passait, qu’on déclenchait l'appareil photo et que la zone de netteté se faisait sur le sujet qui a été choisi. En simplifiant, la route, c’est ce temps qui passe, la maison le présent et le passé (comme un souvenir) et le paysage, tous les temps réunis et presque infinis. Les temps s'interpénètrent. Il y a le temps en mouvement, le temps arrêté, et on ne sait pas si l’image se situe dans le présent, le passé ou le futur.
“La maison bleue”, huile sur toile, 146 × 97 cm
“ENTRE-TEMPS”, Jean-Philippe BRUNAUD, 3 Avril, 3 Mai 2025
DELAMOUR Gallery , 53 rue de Seine ( cour), 75006 Paris